Autant l'avouer, j'ai toujours eu un souci avec le Jazz. A cheval entre l'évidence de la musique populaire et la complexité de la musique dite savante, mes oreilles ne savent plus sur quel lobe danser et elles ont tendance à se braquer. Comment expliquer alors que la musique de Wanderlust ait su séduire ces mêmes oreilles jusqu'à leur faire oublier tout réflexe de méfiance ? Peut-être grâce au fil thématique que le spectacle propose à l'auditeur. Chaque morceau est l'illustration d'un mot étranger qui n'a pas d'équivalent dans notre langue; un concept donc, qui peut nous être familier sans qu'on l'ait pourtant jamais nommé. Ainsi, la musique de Wanderlust nous invite à la suivre dans une forme d'exotisme avec la garantie d'y retrouver, intuitivement, un terreau familier. Et ce mariage entre exotisme et familiarité ne s'embarrasse pas de la dualité populaire/savant; il se préoccupe seulement de résonner de façon juste à notre oreille, comme étant effectivement le "bon" son qui désigne ce qu'on nous a préalablement annoncé. Et cette évidence thématique se déploie dans ses envolées lyriques, dans ses solos de musiciens souvent impressionnants et énergiques, dans ses plages très richement orchestrées ou au contraire épurées, dans ses rythmes changeants et surprenants et, enfin, dans la voix sans cesse renouvelée de la chanteuse Ellinoa; une voix dynamique, douce, mélancolique, malicieuse et toujours, toujours accueillante. Elle est le guide idéal et inspiré de ce voyage musical autour du monde.

(rédacteur-en-chef du magazine culturel BiTS d'Arte)